On entend souvent
attribuer la difficulté de réaliser une photo techniquement réussie de par sa mise au point et son exposition, en mettant en cause le mauvais fonctionnement ou tout simplement l’incompétence technique de l’appareil photo. Évidemment, nous savons aussi mais ne l’avouons pas toujours, que l’erreur originelle dépend aussi souvent d’une mauvaise utilisation ou d’une méconnaissance des limites de ce dernier par son opérateur. Qu’en est-il vraiment aujourd’hui en cette nouvelle ère de l’intelligence artificielle et des prouesses de l’avancée technologique de l’équipement photo traditionnel ou non. Voici un survol rapide de certains éléments déterminants dans la réussite d’une belle photo.

Mais d’abord un mot de nos “commanditaires”, i.e. les équipementiers, sur les limites techniques et d’interprétation des appareils photo numériques actuels. En une phrase, on peut dire que leurs performances sont aujourd’hui exceptionnelles si l’on les compare avec les anciens appareils de l’ère argentique et ces améliorations sinon ces complètes mutations peuvent être observées à tous les niveaux de la pratique photographique. Nous pourrions même ajouter que pour “rater” une photo complètement, il faut ou bien être vraiment de mauvaise foi sur la configuration initiale de l’appareil ou encore particulièrement malchanceux ou négligent. Ceci étant dit, passons maintenant aux choses sérieuses.

Mise au point et netteté du sujet (profondeur de champs et mode d’exposition). On peut dire que la netteté d’un sujet est souvent le point de mire (ou d’attention) que l’oeil de l’observateur capte en priorité. à l’inverse les zones de floue ont plutôt un rôle contextuel dans l’interprétation de l’image. Il s’agit donc pour l’auteur-photographe de bien définir les parties du sujet et de son environnement qui seront bien définis ou au contraire moins nettes. Il y a certes la mise au point en tant que tel à perdre en considération et l’appareil photo numérique peut effectuer cette opération dans la mesure ou on lui indique proprement l’endroit pour ce faire et l’efficacité des systèmes automatisés reste exceptionnelle par rapport à une mise au point faite visuellement et manuellement. Ce point focal représente le centre de netteté qui peut s’élargir en fonction de l’ouverture choisie pour l’objectif de prise de vues. Certains modes (scènes) automatisés pourront même appuyer de façon pertinente le ou la photographe dans cette démarche qu’il s’agisse de paysage, de portrait, de photo d’action, etc. 

Style photo (palette chromatique et effet) et exposition. Avant même de porter l’oeil au viseur électronique (EVF) ou à l’écran (LVF) de l’appareil photo, il faut tout de même indiquer à ce dernier quel sera le style d’image qui nous conviendra d’utiliser pour la captation du sujet. Traditionnellement le noir et blanc ou la couleur était les deux grandes alternatives offertes par la photographie argentique sur pellicule. Cette dernière pouvait aussi  se décliner en diverses interprétations chromatiques ce qui est assimilé aux simulations de film de maintenant et qui font parti de ces styles d’image pouvant être programmés à priori de la prise de vues dans l’appareil photo numérique. À cela s’ajoutent aussi toute une gamme d’effets spéciaux qui remplacent les filtres optiques et les manipulations de laboratoire d’autrefois en argentique. 

Cadrage et composition. C’est vraiment votre cadrage et l’angle de prise de vue qui pourra définir le mieux  la composition de votre image. L’ordre, la proportion et la perspective de votre sujet et de son contexte seront les éléments-clés et en cela votre appareil photo ne pourra vous être vraiment utile à vous suggérer une composition particulière parmi d’autres. Ce que vous mettrez dans votre canevas photographique demeure votre entière responsabilité. 

Sensibilité (ISO) et texture de l’image. Avec l’avènement de la photographie numérique, plusieurs ont tendance à ne plus considérer la matière première de l’image captée, i.e. sa texture engendrée par par la multitude des points pixels qui composent celle-ci. Toute image photographique est composée essentiellement par la présence du grain argentique ou encore par la trame des points numériques (pixels). Ces deux derniers contribuent à créer une texture plus ou moins perceptible de cette image. Règle générale, plus la sensibilité (ISO) utilisée pour le film ou programmée pour le capteur numérique, plus cette “texture” devient évidente et souvent associée au bruit numérique dans le dernier cas. Alors qu’en argentique, on acceptait sa présence inévitable selon le contexte de prise de vue, il semble qu’à l’ère du numérique on cherche à la prévenir sinon l’abolir mais l’adéquation entre la sensibilité (ISO) et la texture de l’image enregistrée demeure toujours présente malgré toutes les prouesses technologiques actuelles. 

Moment décisif et point final. En viendrons-nous avec l’affinement de l’intelligence artificielle à laisser à notre appareil photo le choix final de son déclenchement? Peut-être car ce n’est qu’une question d’apprentissage culturel à intégrer dans le développement de cette dernière (IA). Entretemps cette décision déterminante du moment de prise de vue reste la responsabilité du photographe biologique que nous sommes. Ce déclic décisif représente souvent l’élément clé de l’impact de notre image captée. Moment privilégié d’une expression fugace du sujet humain ou non, l’anticipation et l’entrainement du photographe contribue fortement au succès de la démarche créatrice. 

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J’entend trop souvent que les limites de nos appareils photo sont responsables de nos déconvenues photographiques mais quand on y réfléchit plus profondément et qu’on analyse froidement les tenants et aboutissants de notre recherche et nos réalisations iconographiques, on voit bien qu’il y a toujours place à s’améliorer dans une meilleure compréhension de notre sujet, de son contexte, de son évolution et de l’interprétation qu’on veut lui prêter. Quant à “C’est la faute à qui?”, un peu d’introspection et beaucoup d’humilité peuvent certainement nous aide d’une précieuse aide. 

Photos Daniel M